Avec les mains, à 20 heures, l’heure des tapas virtuelles, on applaudit volontiers la France solidaire de ses soignants.

Avec les mains, quelle que soit l’heure, d’autres frappent leur conjoint, leurs enfants. On plaint volontiers la France de ses soignés.

Inutile de se voiler la face. Le masque ne nous protège pas contre notre lâcheté de ne pas vouloir voir au JT cette femme au nez cassé, à la mâchoire fracturée, aux yeux au beurre noir qu’elle tente maladroitement de dissimuler derrière ses lunettes de soleil. Lunettes de soleil, curieuse expression quand il s’agit du soleil de l’enfer !

Et c’est pourtant la réalité. Aussi vraie que l’autre, mais moins belle. Il ne faut pas s’en accommoder.  Il y a la France qui se bat et ceux qui battent la France, ses principes, la dignité humaine, animale, la honte nationale. Il ne faut pas se faire injustice soit même en ne dénonçons pas, en ne témoignant pas, en n’interpelant pas. Le silence est toujours complice ou trompeur. Refusons la légion d’horreur, rouge sang, portés à la boutonnière de notre conscience.

Ne nous fions pas aux apparences.  Les témoignages après un drame se ressemblent. « Il était sans histoire, un voisin calme …c’est vrai que sa femme ne parlait à personne, plutôt craintive, ses enfants ne jouaient pas avec les autres… toujours à la maison ». « On n’aurait jamais imaginé un tel drame, juste à côté de chez nous ».  Mais il ne s’agit pas d’imaginer.  La ligne imaginot est une erreur qui aura couté beaucoup de vies. Pas de sur place.  Regardons, parlons, échangeons avec ces silencieux car un mot, un regard, peuvent sauver une vie. Dénonçons !

Patrick Lelong

5/05/2020