Les mots voyagent et peuvent se perdre mais ils finissent toujours par retrouver leur sens, leur centre, la bonne trajectoire. Il leur arrive cependant d’être détournés par des vents contraires (sans odeurs mais bruyants), en particulier quand ils sont créés par ces vigies modernes que sont les présentateurs du JT. Ce sont des mots contre nature, créés dans des laboratoires de boîtes crâniennes parisiennes. Seul le vaccin du bon sens et de la raison pourra les empêcher de contaminer la planète entière.  Après « distanciation sociale », mutation artificielle de « distance sanitaire », une nouvelle manipulation langagière vient d’apparaître qui s’attaque directement à nos neurones : autocariste.

Comme tous les ploucs, moi je disais « chauffeur d’autocar ». Quelle erreur, ce n’est pas la même chose. Un chauffeur d’autocar est un individu qui conduit un autocar. Un autocariste est un individu qui se demande comment après le confinement, il va pouvoir conduire son autocar en respectant la distanciation sociale. C’est en quelque sorte, un stratège du post confinement. Comment les présentateurs du JT qualifieront- ils demain les porteurs de masques sanitaires ? Des « masquéristes » ? Autrement dit des individus qui s’expriment derrière leur masque. Et comment appeler les salafistes qui porteront un second masque ? Des « salamasquèristes » ? A 20 heures, chaque jour, le journal télévisé m’émerveille. Quel voyage dans nos cerveaux, quel vent dans nos cerveaux lents… Vaincre le Covid 19 est à notre portée. Retrouver l’exactitude, la beauté, la poésie des mots reste un long périple digne d’Ulysse. Par pitié, l’ode hissez !

 

Patrick Lelong

30 avril 2020