Les masques sont là pour nous faire peur ou nous faire rire. C’est selon. En tout cas, pour cacher la réalité. La mascarade se dit d’un déguisement étrange, d’un accoutrement ridicule, d’une mise en scène trompeuse, d’une comédie hypocrite et tutti quanti nous dit le Larousse. A défaut de relire Molière, il sera bientôt possible de jouer « Les précieuses ridicules », dans le rue, à la vue de tous. Le rêve grandiose des « bobo » de vivre en artiste, même sans talent se jouera dès demain.

Passez du masque bon marché au masque du Bon Marché, il fallait un virus exceptionnel pour y songer. Qu’il soit ici remercié. La pénurie de masques n’apporte pas la pénurie de paraitre. Au contraire. Tout le monde devient créateur. Le monsieur Paul par exemple, toujours vaillant devient couturier. Et la madame Claude redécouvre le travail d’intérieur. Tout le monde s’active à plate couture. Et oui, le masque permet de démasquer l’inconnu en nous.

On va enfin pouvoir vivre masqué et le revendiquer simplement en le portant. Le masque deviendra lisible, militant, branché, signifiant car signifié, latent car patent, connoté car dénoté.  Un masque ethnique, un masque qui affirme la différence entre le genre et le sexe, un masque aux couleurs de son entreprise pour renforcer la culture hygiénico-publicitaire. Fier de son masque !  On ne dira plus « bas les masques ».

Le mètre de distance se transforme déjà en un mètre de couture, le fil de la conversation devient du fil à clouer le bec. Tout est prêt, les fils rouges, le fil d’Ariane, le fil à couper le beurre, le fil à plomb, tous ces fils s’enfilent qui filent devant nos yeux ébahis.

Le confinement aura ainsi permis de dérouler le fil de nombreuses vies. Comme cela a déjà été répété, la vie ne tient souvent qu’à un fil. Mais attention : il ne faudrait surtout pas en découdre.

Patrick Lelong

Le 2/05/2020